L’incompris — l’histoire de l’entrepreneur

L’entrepreneur est à l’origine de la création d’une activité économique. Il possède les compétences et la motivation suffisantes pour créer une activité économique, se lancer dans un secteur d’activité et créer des emplois. L’entrepreneur est caractérisé par — une implication forte dans son projet, un investissement matériel et moral important, une personnalité marquée par un leadership naturel. N’est-ce pas beau tout ça ? C’est si joliment dit car cela donne l’impression que l’entrepreneur est un surhomme. Mais alors …

Devant des grandes réussites, on crie au génie… en pensant que c’est dû surtout au talent (ou à la chance). On oublie les milliers d’heures que les uns et les autres ont mis à peaufiner leur art, leur flair de la bonne idée. Pour les plus talentueux, le succès est au rendez-vous, selon un mix variable d’éléments tels que l’argent, la reconnaissance, le statut, la visibilité publique.

De nombreux autres, par contre, restent où se perdent sur les bords du chemin, parfois avec un talent que l’on peut juger quasi égal, mais qui n’a pas rencontré son marché.

Dans un cas comme dans l’autre, le succès a beaucoup à voir avec la capacité à savoir se vendre. Et même quand on sait se vendre, le succès n’est pas toujours au rendez-vous car l’entrepreneur se retrouve souvent dans des situations inconfortables : on arrive pas ou on ne s’est pas payé pendant plusieurs mois, on attend la grosse commande qui doit venir ou la grande opportunité, on veut continuer à y croire (mais l’entourage commence à avoir des doutes)…

Le visionnaire qui réfléchit à son projet est incompris, jugé, vu comme un être asocial, celui qui ne pourra pas continuer ainsi longtemps, celui qui ne sait pas s’insérer dans la société, celui qui mange toutes ses économies. Mais au moment où sa vision commence à se concrétiser, que les fruits de son dur labeur commencent à payer au-delà des attentes espérés, et que cette réussite est visible du monde entier, les gens ne comprennent pas le prix qu’il a fallu payer pour avoir de tels résultats. Au contraire, ils attribuent cela à la chance. Néanmoins c’est à ce moment précis là que tout le monde voudraient être à la place de l’homme qui réussit. Ce qui montre l’incompréhension du travail de l’entrepreneur.

Personne n’arrive à comprendre que cette période est nécessaire, c’est celle au cours de laquelle on réfléchit à ce qu’on veut réellement, où on pose les bases de notre nouvelle vie, on découvre de nouvelles opportunités, on rencontre des gens qui nous ouvrent de nouveaux horizons, on hume l’air du temps, les nouvelles tendances, etc… C’est une période de découverte, que finalement tout le monde rêverait de vivre au moins une fois dans sa vie, mais n’ose pas le faire parce qu’ils ne sont pas prêt à payer le prix fort et plutôt que d’accepter la façon de vivre des autres, impose ses propres convictions à ceux qui le font.

Efuet And. Atem, fondateur de World like Home en est un exemple phare. Dans son livre qui va bientôt paraître Souriant dans les épreuves, Les leçons de notre premier échec, il raconte avec beaucoup d’humour et comme une balade en voiture, la succession d’épreuves et d’échecs qu’il a, et continue de rencontrer pour la mise en place de sa Start-up World like Home. Il a un rêve et il est passionné. Il a beau l’expliquer à son entourage, mais aux yeux de beaucoup il est incompris. On se demande pourquoi il continue dans cette voie malgré toutes les difficultés qu’il rencontre. Mais vous savez quoi ? Efuet savoure les petites victoires car c’est elles qui le motivent à garder le cap vers la concrétisation de son rêve : un monde meilleur pour tous.

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Beaucoup de personnes se sont lancés sur cette voie, et il y en aura certainement d’autres. Il faut avoir un mental d’acier pour ne pas perdre de vue son objectif lorsqu’on est entre-deux car l’entrepreneur est incompris de tous les côtés que ce soit par la société, ses amis, sa famille, sa banque, ses investisseurs… Elon Musk était incompris même par ses collaborateurs jusqu’à la réussite récente de SpaceX et Tesla. Et c’est le moment où il ne faut surtout pas craquer et reprendre ou créer un projet « faute de mieux » juste pour avoir un statut social, un emploi du temps, une rémunération et trouver grâce auprès des uns des autres qui seront soulagés que vous soyez enfin rentré dans le rang (ou presque parce que entrepreneur…).

Karl Lagerfeld aussi était considéré comme un fou lorsqu’il a décidé de reprendre dans les années 1980 la maison de couture Chanel. A l’époque elle n’était pas aussi célèbre et mondialement connue. « Quand j’ai repris Chanel, personne n’en voulait. On me disait: mais non, ne faites pas ça, ne touchez pas à ça, c’est mort. Aujourd’hui c’est devenu quelque chose de sacré, alors que c’était ringard ». Savez-vous pourquoi il était incompris? Tout simplement parce que Coco Chanel, la fondatrice de Chanel était considérée comme une modiste à contre-courant. Jeune femme charmante au style décalé, arborant des tenues tantôt écolière, tantôt garçonne, et n’hésitant pas à porter des polo et pantalons. Elle créait des vêtements simples et pratiques contrastant par leur simplicité et confort, la mode de l’époque très aristocratique (apparat et corsets rigides). Chanel n’a jamais su coudre ni dessiner ses patrons, mais elle avait une vision révolutionnaire de la mode qui reflétait la femme libre et parfois trouble qu’elle était.

« Les gens pensaient que nous étions fous », se souvient l’entrepreneur nigérian Obi Ozor en évoquant les débuts de son entreprise Kobo360. Quand Ozor se souvient des deux premières années après son lancement, il utilise fréquemment des mots comme « fou » et « idiots » pour décrire ce que les gens pensaient de la vision de Kobo360 et de ses deux fondateurs. Il a cofondé Kobo360 en 2016 avec Ife Oyedele. La société fournit une plateforme de logistique électronique qui relie les propriétaires de camions aux clients nécessitant un transport de marchandises: un Uber pour les camions.

Kobo360 a peut-être été couronné « Disruptor of the Year » par le « Africa CEO Forum » en 2019, mais ses débuts ont été douloureux. Ozor et Oyedele ont passé des jours à voyager avec des chauffeurs sur les routes logistiques les plus difficiles du Nigéria, suppliant parfois les responsables de la police de laisser passer leur chargement, évitant les militants dans certains coins du pays ou perdant jusqu’à 30000 nairas nigérians (77 $) par voyage pour payer des escortes de police afin de s’assurer que les marchandises sont arrivées en toute sécurité à leur destination.

« Les assureurs étaient convaincus que nous finirions en prison dans les trois à quatre mois, pensant que nous perdrions définitivement les biens de nos clients », dit-il. Aujourd’hui, l’entreprise compte 172 employés et opère dans six pays: le Nigeria, le Ghana, la Côte d’Ivoire, le Kenya, le Togo et l’Ouganda. L’année dernière, Kobo360 a levé 30 millions de dollars de financement auprès de sociétés comme Goldman Sachs et Asia Africa Investment & Consulting. Ses premiers investisseurs comprennent TLcom Capital, Y Combinator et la Société financière internationale.

Il y en a d’autres comme eux qui connaissent aujourd’hui un succès planétaire. J.K. Rowling, célèbre auteur de la saga Harry Potter déclare : « cela m’aurait beaucoup aidée que quelqu’un ayant connu le succès vienne me dire : tu vas échouer. C’est inévitable. L’important c’est ce que tu fais ». Elle est aujourd’hui l’une des femmes les plus riches du monde, mais elle est partie de rien. En tant que mère célibataire et sans emploi, elle a connue des temps très difficile. Les éditeurs rejetaient son livre les uns après les autres. Les éditions Bloomsbury ont finalement accepté de publier son premier livre Harry Potter. Ils ont cependant insisté sur un conseil : « vous feriez mieux de trouver un travail car personne ne peut vivre de l’écriture de livres pour enfants ». Elle était incomprise!

Alors ? Pensez vous toujours que l’entrepreneur est un surhomme ? Au final l’entrepreneuriat est à la fois un mélange de folie et d’incompréhension. Aux yeux du monde, l’entrepreneur est un fou qui n’a qu’une chance infinitésimale de réussir et devrait donc abandonner après plusieurs échecs. Tandis que l’entrepreneur lui se sent incompris de vouloir poursuivre son rêve et sa passion jusqu’au bout. Efuet est fou de vouloir étaler ses échecs aux yeux du monde dans son livre Souriant dans les épreuves, Les leçons de notre premier échec. Néanmoins, comme disait Steve Jobs: « les gens qui sont assez fous pour penser qu’ils peuvent changer le monde sont ceux qui le font ».

Sandra Mbatcha, Ingénieur calcul
En collaboration avec Efuet And. Atem
Auteur, Souriant dans les épreuves
302 pages, 20 € broché, 6,99 € ebook.

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