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C’est qui un Africain ? Pour l’intérêt de notre article, un Africain c’est quelqu’un qui remplit les deux conditions suivantes:
- La société où il se trouve le définit comme africain (en l’occurrence la société française) et
- Il ou elle s’identifie comme africain.
Notre objectif c’est de montrer les différentes pressions que subissent les africains en France.
Clarisse est une africaine arrivée en France pour ses études. La première année de ses études, son visa est changé en titre de séjour. Par la suite, pour le conserver elle a l’obligation de valider son année scolaire; ou sinon dans le pire des cas elle ne peut se permettre que deux échecs. Voilà donc une épée de Damoclès qui pèse déjà sur sa tête car si elle n’a pas de titre de séjour, elle ne peut rien faire (que ce soit travailler, voyager…). Gardons à l’esprit que pendant tout ce temps, elle a besoin de se nourrir, se vêtir, payer son loyer, sa scolarité et envoyer un peu d’argent à la famille restée au pays. Comment faire?
Elle doit donc trouver un job pour subvenir à ses besoins. Dis comme ça, cela semble facile mais ce n’est pas évident. Il faut avoir envoyé des dizaines de CVs pour espérer avoir un retour favorable, sur un terrain que Clarisse ne connaît pas. Quand bien même elle est recruté, parfois les horaires du job ne correspondent pas à celle de l’école. A ce moment-là il faut choisir: ne pas aller travailler, ou sécher un cours (au risque de s’attirer les foudres des enseignants) et aller travailler pour avoir un peu d’argent. Sachant que de retour du travail il faut se procurer le cours manqué, et essayer de l’apprendre le soir même pour le lendemain (avec toute la fatigue cumulée de la journée). Quelle pression!
A cela s’ajoute le regard de l’autre. L’autre qui n’a peut-être jamais côtoyé un africain, qui lui jette un regard oppressant et s’en suit généralement: discriminations, argots racistes, mise à l’écart, lourdes démarches administratives, difficulté à s’intégrer, etc. À l’école ou au job, parfois elle aura du mal à se faire comprendre. Vous savez pourquoi ? A cause de son accent. Ils diront : « tu parles soit trop lentement, ou soit trop vite. Ton accent donne l’impression que tu n’articule pas bien ».
Les quelques amis qu’elle se sera fait ne manqueront pas de lui poser poliment des questions du genre: « Nous on a des points de beauté noir sur notre peau blanche. Et vous (africains) c’est comment? Vous en avez? C’est blanc? ». D’autres demanderont: « c’est comment dans ton pays d’origine ? Qu’y a-t-il d’autre en dehors des forêts ? Vous parlez français ? » Imaginons ensemble la frustration intérieure de Clarisse d’avoir l’impression d’être " un spécimen rare." Pour ne pas perdre la face, elle va tout de même essayer d’y répondre sans colère.
Pendant ce temps, il y a la famille restée au pays qui met de plus en plus la pression parce qu’ils veulent qu’elle envoie de l’argent pour subvenir à leurs besoins. Ils pensent que la France est un Eldorado et que les opportunités de se faire de l’argent fusent de partout. Sans forcément essayer de comprendre que c’est aussi très difficile pour elle et qu’il peut arriver qu’elle n’ait même pas de quoi s’acheter à manger.
Une fois les études terminées, Clarisse doit se confronter à la cruelle réalité du marché de l’emploi. Parce qu’il faut le savoir, il n’est déjà pas évident pour un français de trouver du travail, à plus forte raison un étranger. Et si elle n’est pas embauché à l’issue de ses études, elle aura un an pour signer un contrat de travail. Si, par malchance, elle ne parvient pas à trouver un emploi dans un délai d’un an, elle recevra alors une obligation de quitter le territoire français (OQTF). Si elle a la chance d’avoir un emploi, son salaire doit être égal à 1,5 fois le SMIC et son employeur doit démontrer qu’il n’a pas pu trouver un ressortissant français qui pourrait occuper le poste.
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Et si Clarisse fait l’erreur de tomber amoureuse d’un français, la préfecture peut refuser sa demande de titre de séjour avec mention “vie privée et familiale”. Tu te demandes pourquoi? Parce qu’elle doit démontrer sans ambiguïté que son mariage n’est pas un mariage pour les papiers, un mariage blanc quoi. La décision du refus sera probablement assermentée d’une obligation de quitter le territoire français. Ainsi va la vie, c’est ainsi que Clarisse vit la vie en France.
On peut être amené à penser que toutes ces difficultés proviennent du fait que Clarisse est considérée comme quelqu’un qui viendrait brider ou usurper des opportunités (quelle qu’elle puisse être) destinées aux français. Mais quand est-il de celui qui souhaite créer de la valeur? J’entend par là l’africain qui voudrait entreprendre en France; avec en sortie la création éventuelle d’emplois. Normalement toute société accueillerait à bras ouverts ce genre d’initiatives; mais malheureusement ce n’est pas aussi simple. Efuet And. Atem, fondateur de World like Home, nous raconte dans son livre Souriant dans les épreuves, Les leçons de notre premier échec, les pressions subies qui sont en partie dues au fait d’être africain en France.
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« Par son témoignage, Efuet donne l’opportunité à chacun de comprendre ce que signifie pour un étranger le fait de s’installer en France. Une chance à saisir ! », renchérit Sienne Thery, une lectrice du livre d’Efuet. Elle poursuit : « En plus d’être enrichissant pour toute personne souhaitant se lancer dans l’entreprenariat, cet essai me semble pouvoir jouer un rôle primordial pour notre société française. En effet, il y a quelques années, le pape François appelait chacun de nous à construire des ponts, pas des murs. Ainsi, selon moi, l’auteur construit par cet ouvrage un réel pont. En effet, en France aujourd’hui, il subsiste une grande ignorance en ce qui concerne l’immigration et les nombreux obstacles et souffrances que rencontrent les étrangers dans notre pays (démarches administratives, interdictions de travail, discriminations de toutes sortes, précarité subie, lien délicat avec le pays d’origine, culpabilité vis à vis des proches qui y sont encore, pression parfois de ceux-ci… ). Or je me rends compte dans mon entourage que beaucoup de français n’en ont pas connaissance. Manque d’empathie ou d’intérêt de leur part ? Je ne pense pas. Je pense simplement que trop de murs les séparent. Barrière culturelle, barrière de la langue, niveaux d’éducation trop différents. Compliqué de comprendre ce que vit l’autre ! Je finirais par le point que j’ai le plus aimé tout au long de son ouvrage; l’auteur divulgue un message qui me plait et qui me servira personnellement dans la vie de tous les jours : ne pas choisir la facilité, croire en ses ambitions, en ces intuitions et en ces projets, en sachant que la réussite n’est jamais facile. ».
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En conclusion, être Africain en France c’est gérer des pressions administratives, sociétale, la culpabilité et la pression de la famille resté en Afrique, la pression dû aux difficultés à s’intégrer, les discriminations de toutes sortes, et parfois le fardeaux lié à l’histoire compliquée de la France et son pays d’origine.
Sandra Mbatcha, Ingénieur calcul
En collaboration avec Efuet And. Atem
Auteur, Souriant dans les épreuves.
Format broché 20 € ; Format Ebook 6,99 €